RECHERCHE : La date d’apparition des céréales recule de plus de deux millions d’années

Capture d'écran du communiqué de presse : RECHERCHE : La date d’apparition des céréales recule de plus de deux millions d’années

Un consortium international, mené par Valérie Andrieu, enseignant-chercheur à l’Institut Méditerranéen de Biodiversité et d’Ecologie (IMBE - Aix-Marseille Université/CNRS/IRD France) a découvert les plus anciens pollens de céréales connus au monde et daté de 2,3 Ma dans la longue série sédimentaire d’Acıgöl (600 m de long, 0 – 2,3 Ma, SO Anatolie). Cette découverte permet de faire reculer de plus de deux millions d’années l’apparition des céréales dans les écosystèmes, et de remettre en question le paradigme de la domestication au Néolithique. Alors que l'on pensait que les humains étaient les géniteurs des céréales, celles-ci semblent avoir émergé naturellement, l'Homme ayant simplement accéléré leur expansion. Cette recherche a fait l’objet d’une publication sortie fin avril dans la revue Scientific Reports (Nature).

Les plus anciens pollens de céréales ont été trouvés dans le sud-ouest de l’Anatolie, dans la longue série lacustre d’Acıgöl datant de 2,3 millions d’années (Ma). Ces pollens, appelés «proto-céréales» apparaissent aux côtés de spores de champignons coprophiles qui sont d'excellents indicateurs de la présence des troupeaux de grands mammifères car ils se développent exclusivement sur les excréments de ces animaux. Le pollen des ancêtres d’arbres cultivés (olivier, noyer, châtaignier, noisetier Prunus), de même que d'abondants restes fossiles de grands mammifères (mammouth, rhinocéros, okapi, chameau et de nombreux chevaux et bovidés) ont également été trouvés.

Alors que l’apparition des céréales était jusqu’à présent attribuée à « l’invention » de l’agriculture par l’Homme, ces recherches soutiennent une hypothèse alternative. Les proto-céréales proviendraient de graminées sauvages dont l’émergence a pu être favorisée par les troupeaux de grands d'herbivores attirés par les eaux douces du lac Acıgöl. Par le piétinement, l’enrichissement des sols en azote et le broutage, les troupeaux de grands herbivores ont pu modifier le génotype des proto-céréales naturellement présentes à Acıgöl, favorisant ainsi l'émergence des céréales modernes. Les populations d’homininés, présentes dans le sud-ouest de l’Anatolie aux alentours d’1,4 Ma ont pu bénéficier de la présence de céréales dans les écosystèmes herbacés.

Au niveau régional, Valérie Andrieu poursuivra ses recherches sur le sujet dès septembre 2021 au sein de l’Institut Méditerranéen de Recherches Avancées d’Aix-Marseille Université (IMéRA). Celles-ci porteront sur les pollens de proto-céréales, datant d’il y a 1,1 Ma, découverts à Marseille. Si la présence de pollen de proto-céréales se confirment ailleurs sur le globe, cela nécessitera une révision fondamentale de la vision globale de l’histoire de la nutrition humaine.

En savoir plus : Andrieu-Ponel V., Rochette P., Demory F., Alcicek H., Boulbes N., Bourlès N., Helvaci C., Lebatard A., Mayda S., Moigne A.M., Nomade S., Perrin M., Ponel P., Rambeau C., Vialet A., Gambin B., Alçiçek M.C. sous presse, 2021. Continuous presence of proto-cereals in Anatolia since 2.3 Ma, and their possible co-evolution with large herbivores and hominins. Scientific Reports (Nature), 11, 8914. https://doi.org/10.1038/s41598-021-86423-8

Ces recherches ont été menées au niveau français par l’Institut Méditerranéen de Biodiversité et d’Ecologie Marine et Continentale (IMBE, Aix-Marseille Université/CNRS/IRD), le Centre Européen de Recherche et d’Enseignement des Géosciences de l’Environnement (CEREGE, Aix-Marseille Université/CNRS/IRD/Collège de France/ INRAE), le Laboratoire de Préhistoire, Muséum national d’Histoire naturelle (UMR 7194, UPVD, CERP) le Conservatoire Botanique National Méditerranéen de Porquerolles, le Laboratoire des Sciences du Climat et de l’Environnement (IPSL‑CEA‑CNRS, UMR 8212‑UVSQ), le CEA Saclay, le laboratoire Image, Ville, Environnement (LIVE, UMR7362, Université de Strasbourg), et au niveau international par le Department of Geology, Pamukkale University, le Department of Geology, Dokuz Eylül University, le Department of Biology, Ege University ainsi que l’Institute of Earth Systems, University of Malta.

Contact

Institut Méditerranéen de Biodiversité et d’Ecologie marine et continentale

Valérie Andrieu – Enseignant-chercheur
valerie.andrieu[a]univ-amu.fr

 

 

 

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